Qui est le prince « libellule » du Japon et pourquoi la monarchie est-elle menacée ?

Découverte Par Thomas Vignau -

Le Japon vient de célébrer la majorité d’un prince pas comme les autres. Hisahito, 19 ans, est le premier membre de la famille impériale à atteindre l’âge adulte depuis près de quatre décennies. Mais derrière les fastes des cérémonies qui l’ont officiellement reconnu comme adulte, une inquiétude plane : le jeune homme pourrait bien être le dernier espoir de survie d’une monarchie millénaire.

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Un prince étudiant et passionné d’insectes

Fils unique du prince héritier Akishino et de la princesse Kiko, Hisahito a grandi à l’écart des projecteurs. Aujourd’hui étudiant en biologie à l’université de Tsukuba, il mène une vie d’étudiant presque ordinaire. Il pratique le badminton et s’intéresse aux questions environnementales. Son sujet favori ? Les libellules, auxquelles il a déjà consacré une recherche scientifique menée sur le domaine impérial d’Akasaka, à Tokyo.

Lors de sa première conférence de presse en mars, il a exprimé son souhait de poursuivre ses études dans l’écologie urbaine avec une ambition : protéger les populations d’insectes menacées par l’expansion des villes. Une passion qui lui vaut le surnom affectueux de prince libellule.

Un héritage en péril

Mais si le destin d’Hisahito semble tracé, son avenir institutionnel est bien plus incertain. Le prince est l’un des rares héritiers masculins d’une dynastie qui revendique 1 500 ans d’histoire ininterrompue. Après l’empereur Naruhito et son père Akishino, il est le seul homme en âge de succéder au trône.

La pénurie de successeurs résulte d’un cadre légal rigide. Depuis 1947, la loi impériale limite l’accession au trône aux seuls descendants masculins. Or, la famille impériale compte aujourd’hui 16 membres, dont la majorité sont des femmes. Même la princesse Aiko, fille unique de l’empereur Naruhito et très populaire auprès du public est exclue de la succession.

Historiquement, le Japon a pourtant connu huit impératrices, la dernière ayant régné au XVIIIe siècle. Mais aucune d’elles n’a transmis la couronne à sa descendance, renforçant l’idée que seule la lignée masculine garantit la continuité.

Un débat politique enlisé

La naissance d’Hisahito en 2006 avait temporairement écarté le débat sur une possible ouverture de la succession aux femmes. Mais aujourd’hui, l’impasse demeure. Certains conservateurs suggèrent d’autoriser l’adoption d’héritiers issus de branches impériales disparues. D’autres plaident pour une réforme profonde, permettant aux femmes de conserver leur statut après mariage et, à terme, de monter sur le trône.

En mai dernier, le quotidien conservateur Yomiuri a appelé à une révision urgente de la loi rappelant que la monarchie ne pouvait rester prisonnière d’un système qui l’étrangle.

En attendant, le poids de cette incertitude repose sur les épaules d’un jeune homme qui, pour l’heure, préfère observer les battements d’ailes des libellules plutôt que l’ombre pesante du trône.