Saviez-vous que le Japon abrite désormais une espèce… qui n’existait pas il y a 50 ans ?

Découverte Par Laure A. -

Le Japon fait face à un phénomène inquiétant : des salamandres géantes chinoises, introduites par erreur, se sont croisées avec l'espèce locale, menaçant la biodiversité du pays.

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L'introduction accidentelle dans l'écosystème japonais

La salamandre géante de Chine du Sud (Andrias sligoi) est l'un des plus grands amphibiens de la planète, atteignant parfois 1,80 mètre. Surnommée "fossile vivant", elle existe depuis plus de 170 millions d'années. Elle vit naturellement dans les montagnes de Chine et a été chassée pour sa chair et ses vertus supposées.

Dans les années 1960, le Japon a commencé à importer ces salamandres pour ses restaurants haut de gamme et ses aquariums privés. En 1973, face à l'ampleur du commerce, le gouvernement a imposé des régulations. Cependant, beaucoup de salamandres invendues ont été relâchées dans la nature, créant ainsi une crise écologique.

Le phénomène d'hybridation et ses conséquences écologiques

Les salamandres chinoises ont rencontré l'espèce locale japonaise (Andrias japonicus), déjà quasi menacée, et ont commencé à se croiser. Ce croisement a produit des hybrides aux conséquences écologiques importantes. Une étude réalisée en 2024 sur des échantillons prélevés dans la rivière Kamogawa à Kyoto a montré que de nombreux hybrides étaient présents dans la région.

Ce phénomène s’est intensifié avec la reproduction entre hybrides et spécimens "purs", générant une grande diversité génétique. Les scientifiques ont noté que ces espèces ont bien cohabité, entraînant la création d'une nouvelle population hybride qui se développe rapidement dans l'écosystème japonais.

Les défis d'identification et de taxonomie

Depuis plusieurs années, la classification des salamandres géantes a évolué, rendant leur conservation plus difficile. En 2019, il a été révélé que la salamandre géante de Chine était en réalité composée de trois espèces distinctes. Plus récemment, des recherches ont suggéré qu'il pourrait y en avoir jusqu’à neuf.

Cette confusion taxonomique complique les efforts de protection, car certaines espèces sont protégées, tandis que d'autres, récemment identifiées, n'ont pas encore de statut officiel.

Les stratégies de conservation face à une situation critique

La situation au Japon est de plus en plus préoccupante. Depuis 2011, aucune salamandre "purement" chinoise n'a été observée dans l'archipel, suggérant leur quasi-disparition. En Chine, les populations sont également en déclin rapide, menaçant leur extinction à court terme. Pour répondre à cela, plusieurs actions ont été mises en place :

  • La recherche des derniers individus purement chinois, surtout les femelles.
  • Le lancement de programmes d'élevage contrôlés pour préserver la diversité génétique.
  • L'amélioration des techniques d’analyse génétique pour mieux différencier les espèces.
  • La protection des habitats naturels des salamandres.

Comme le soulignent les chercheurs, le défi est de maintenir séparées les populations chinoises et japonaises, tout en préservant la diversité génétique nécessaire à leur survie. Ce combat pour leur survie est une véritable course contre la montre.

Les implications pour la biodiversité mondiale

Cette situation illustre un problème global : l'introduction accidentelle d'espèces étrangères dans des écosystèmes fragiles. L'hybridation entre espèces proches mais distinctes peut entraîner la disparition de lignées génétiques uniques, ce qui serait une perte irréversible pour la biodiversité.

L’avenir de ces salamandres géantes, vestiges d’un passé lointain, dépend de notre capacité à réparer les erreurs passées. Leur préservation nécessite une collaboration internationale pour limiter les effets de l'introduction de ces créatures dans des écosystèmes non-natifs.