Pourquoi la grippe explose au Japon avant même l’hiver (et ce que craignent les scientifiques)
À peine l’automne installé, le Japon fait déjà face à une vague de grippe d’une ampleur inhabituelle. Alors que les feuilles commencent à peine à tomber, les hôpitaux se remplissent et les scientifiques tirent la sonnette d’alarme. Cette année, le virus semble avoir décidé d’arriver bien avant l’hiver.

Un début d’épidémie qui surprend tout le pays
Le 3 octobre, le ministère japonais de la Santé a officiellement déclaré l’état d’épidémie. Une annonce inattendue en plein cœur de l’automne, alors que la saison grippale débute habituellement fin novembre. En quelques jours seulement, les courbes d’infection ont explosé, dépassant largement les prévisions établies par les autorités sanitaires.
Au 10 octobre, plus de 6 000 cas étaient déjà recensés à travers l’archipel, contre 4 000 hospitalisations une semaine plus tôt. Chaque établissement médical accueille désormais en moyenne un patient atteint de la grippe, soit quatre fois plus qu’à la même période l’an passé. Les préfectures d’Okinawa, de Tokyo et de Kagoshima enregistrent les taux les plus élevés, et le nombre de cas continue d’augmenter jour après jour.
Les enfants en première ligne
Les plus jeunes figurent parmi les principales victimes de cette épidémie précoce. Près de la moitié des 287 patients hospitalisés en septembre avaient moins de 14 ans. Dans les écoles, la grippe s’est propagée à une vitesse fulgurante, obligeant plus d’une centaine d’établissements à fermer temporairement leurs portes pour tenter d’endiguer la contagion.
Les autorités appellent désormais à la prudence : éviter les visites non urgentes à l’hôpital, consulter rapidement en cas de fièvre ou de toux, se faire vacciner, et respecter les gestes d’hygiène essentiels. Autant de mesures destinées à freiner une épidémie qui, pour l’instant, ne montre aucun signe d’essoufflement.
Une précocité jamais vue
Au Japon, les épidémies de grippe ne sont pas rares. Mais les voir apparaître aussi tôt dans l’année l’est beaucoup plus. Cette fois, le virus a gagné cinq semaines d’avance sur le calendrier habituel. Le Japon a déjà connu des saisons précoces, mais jamais à ce point-là
, souligne Ian Barr, directeur adjoint du Centre collaborateur de l’OMS pour la recherche sur la grippe.
Les chercheurs redoutent désormais que cette flambée n’ouvre la voie à une série d’épidémies hivernales à travers l’Asie, voire au-delà. À mesure que les températures baissent et que les voyages internationaux se multiplient, le risque de propagation vers d’autres continents augmente.
Un cocktail de facteurs aggravants
Derrière cette épidémie précoce se cachent plusieurs causes possibles. D’abord, la reprise massive des déplacements internationaux depuis la levée des restrictions liées au Covid-19 a largement favorisé la circulation du virus. La souche H3N2, identifiée comme responsable de cette vague, était déjà très active en Australie et en Nouvelle-Zélande ces derniers mois avant de remonter vers le nord avec la fin de l’hiver austral.
Le changement climatique pourrait aussi jouer un rôle clé, en perturbant le rythme saisonnier traditionnel des maladies infectieuses. À cela s’ajoute un facteur plus silencieux : le manque d’exposition au virus ces dernières années a réduit l’immunité collective, notamment chez les enfants et les personnes âgées, rendant la population plus vulnérable.
Pour l’heure, les experts se veulent rassurants : le risque d’une pandémie mondiale reste faible. Mais au Japon, l’inquiétude grandit. L’automne ne fait que commencer, et déjà, le pays doit faire face à un hiver sanitaire avant l’heure.